La violencia - 1949
« ISABEL ! » Le hurlement est une plainte, douloureuse, sanglante. Son sang aurait pu se glacer. Son sang aurait dû se glacer. Mais cela fait des mois qu’elle entend de tels cris, Isabel, des mois qu’elle court aux côtés de la mort, main dans la main. Ainsi, ce n’est qu’une fine lame qui coule le long de son visage avant qu’elle ne transplane. Fine larme qui ne floute pas sa vision. Fine larme qui lui permet de voir le corps de sa partenaire s’élever dans les airs. La crucifixion. Le sang. La douleur. La mort.
« Cecilia ? » Elle fait non de la tête, tandis que sa main dessine une croix au niveau de son torse. Son Dieu se fait silencieux, perdu au sein de la violence, ce qui ne l’empêche pas de l’attendre. Elle se déplace au travers du village avec agilité, la née moldue. Autour d’elle, les rires d’enfants se heurtent aux piles de cadavres desquels le sang continue de s’échapper. Le monde, à son image, s’est accoutumé à la violence. Rares sont les choses qui surprennent les sorciers pour qui le conflit a déjà trop duré. Sorciers qui, dit-on, sont à l’origine des batailles qui se réveillent au sein de la campagne sans magie. Peu leur importe, le monde moldu semble être à des kilomètres, si différent, si lointain. Elle-même l’ignore, elle qui y a pourtant grandi. Mais son esprit ne peut y penser, sa propre violence l’attend.
« Prête ? » A peine rentrée, elle est de nouveau prête. Aux côtés d’autres, c’est jusqu’à un autre village qu’ils s’éloignent. À première vue, rien ne différencie le second village du premier. Les rires d’enfants, les cadavres sanglants, tout semble similaire. Pourtant. Pourtant les habitants suintent la richesse. Pourtant les habitants hurlent le pouvoir. L’église est pleine, remplie de sorciers et de sorcières qui, comme Isabel, se laissent porter par leur foi aveugle en un Seigneur qui ne se fait pas connaitre. Un Seigneur qui, dit-on, appelle à la violence. Les preuves ne sont pas. Les preuves importent peu. Seule la croyance soulève le cœur du monde. Seule la croyance appelle à la violence.
« Amen. » La prière finit à peine qu’ils entrent en action. C’est elle qui s’approche du prêtre. C’est elle qui laisse son sang couler. C’est elle qui le traine autour du village en flammes. Elle, la fille de Dieu. Elle, la militante qui dit se battre pour un meilleur monde.
« Isabel ? » Adossée contre le mur d’une maisonnée en ruine, elle halète. D’un mouvement de main, elle essuie le vomi qui coule encore de ses lèvres. Un moment durant, le monde tourne. Un moment durant, elle se sent faiblir. Puis le moment passe. Puis elle l’ignore. Elle l’ignore parce qu’elle ne veut pas y penser, elle ne veut pas penser à ce qu’il peut signifier. Le corps perd sa forme humaine. Lentement, le geai bat des ailes fatiguées.
La Ira - 1952
La rage violente son cœur. La rage laisse des larmes couler le long de son visage. Larmes que l’enfant caresse avec confusion. Assit sur les genoux de sa mère, le petit garçon sourit. Un sourire qui parvient malgré tout à faire naitre une expression jumelle sur le visage d’Isabel.
« Il est temps d’aller dormir, Felipe » Ses bras potelés entourent le cou de la sorcière, tandis que son visage se pose sur sa poitrine. Il pleur un long moment, décidé à ne pas se séparer de sa mère. Mais la fatigue finit par prendre le dessus. Il se laisse porter par un sommeil sans rêve, seul moyen que l’esprit a trouvé afin de parvenir à rester endormi.
La rage suinte.
« Calme-toi, Isabel. » « Que je me calme ? QUE JE ME CALME ?! » Les larmes coulent.
« Qu’est-ce que je suis censée faire ? » « Bats-toi. Bats-toi comme tu t’es battue. » « Les choses ont changé, tu le sais. » « Elles n'ont pas changé tant que cela. » Elle rit, la militante. Elle se laisse tomber sur une chaise, la mère.
« Je peux plus ne penser qu’a moi désormais. » Le silence murmure.
« Qu’est-ce que le ministère a dit ? » « Que les États-Unis ne voulaient pas de sorciers impliqué dans La Violencia. » « Felipe n’est pas parvenu à les faire changer d’avis ? » Le rire est moqueur. Le rire est cynique.
« Ils ont demandé après le père. »Les jours passent. Le sang coule.
« Il parait que tu essaies de quitter le pays ? » Le regard d’Isabel rencontre celui d’une inconnue à l’accent étranger. Elle hoche la tête.
« Juste pour toi, ou toi et le gosse ? » Elle se tient droite, la militante, prête à se défendre, prête à protéger l’enfant qui se trouve dans la pièce adjacente.
« Woa, t’inquiète, j’en veux pas à mal. » « Pour deux. » L’étrangère s’approche, ses mots désormais murmurés, secrets.
« Je peux arranger un passage jusqu’au Royaume-Uni. » Espoir.
« Mais cela risque de te couter. » Méfiance. La mère fait un pas en arrière.
« Je n’ai pas d’argent. Regarde autour de toi, personne ici n’en a. » « Je n’ai pas besoin d’argent. » Ses sourcils se froncent, confus.
« Quoi alors ? » « Tu es une combattante, n’est-ce pas ? » « J’étais. » L’inconnue rit.
« Rend moi service, ici et là. Bats-toi comme tu sais si bien te battre. » « Pendant combien de temps ? » « Aussi longtemps que nécessaire. » La Colombienne rit.
« Qu’est-ce qui t’empêches de m'utiliser sans rien ne m'offrir en retour ? »Le serment est fait. Leur sort est scellé.
Isabel se bat. Isabel tue. Isabel blesse. Isabel attend.
LA PROMESA - 1959
Les larmes coulent. Nombreuses, le flot semble infini. Elles caressent un visage qui ne peut les retenir. Un visage qui ne comprend pas. Un visage qui ne comprendra surement jamais.
« Porque ? » Seul mot qui s’échappe d’entre de fines lèvres tristes. Pourquoi. Pourquoi devait-elle partir ? Pourquoi devait-elle partir seule ? Pourquoi devait-elle le laisser en arrière ? Elle ne sait pas. Elle en doute elle-même. La mère doute du monde. La mère doute de la vie. Elle doute de la vie sans celui qui est devenu sa raison d’être, celui pour qui elle se bat. Elle s’est toujours battue, Isabel. C’est ainsi qu’elle a vécu sa vie, c’est ainsi qu’elle la finira. Mais pour la première fois, elle a trouvé une raison, un quelque chose qui la pousse plus loin qu’elle n’a jamais pensé pouvoir aller. Ce petit visage enfantin qui ressemble de plus en plus à un père qu’il n’a jamais connu, qu’il ne connaitra jamais. Mais le fils se moque du père. Le fils ne désire que la mère. C’est la mère qu’il aime. La mère qu’il admire. La mère à qui il obéit. La mère qu’il ne veut pas voir partir.
Les larmes coulent. Une à une, délicates. Elles sont délicates les larmes de la mère. Elles sont délicates parce qu’elles ne veulent pas ajouter à celles du fils. Mais le cœur se brise. Chaque question, chaque demande de l’enfant n’est qu’une lame qui s’y enfonce un peu plus chaque fois. Elle ne veut pas le laisser, Isabel. Elle ne veut pas le laisser mais elle sait qu’elle n’a pas le choix. Le monde demande à voir son père. Le monde demande à voir un homme afin d’attester que l’enfant est le sien. Le père est inconnu, mirage lointain que personne ne désire connaitre. Il est inconnu, alors les frontières ne veulent pas de l’enfant. Elle a trouvé un moyen, la militante. Un chemin silencieux au sein duquel personne ne pourra le trouver. Un moyen de lui faire rejoindre le pays sain et sauf. Mais elle se doit d’y aller seule. Seule au sien d’un nouveau monde. Seule au sein d’un monde loin de la guerre qui ravage le sien. La douleur d’aujourd’hui pour l’espoir de demain.
« Felipe… » Le murmure est délicat. Le murmure calme l’enfant un instant. Accroupie, la mère prend le fils dans ses bras.
« Patience… Souviens-toi, règle numéro quatre… » « La patience comme seule vertu. » Elle rit de ce rire triste, celui qui tente de dissimuler la douleur au fond du regard, la douleur au fond de l’âme. Le petit resserre son étreinte ; la grande caresse les cheveux.
« Mamá ? » « Sí ? » Le silence les enveloppe un moment. Silence profond qui annonce le monde. C’est le silence de ceux qui ne savent pas comment expliquer ce qui s’enroule autour de leur cœur. C’est ainsi qu’est l’enfant. Enfin, il se défait de l’emprise de sa mère.
« Règle numéro neuf. » Nouvelle règle.
« Le retour comme seule promesse. » Elle sourit, Isabel. Sa fine main s’empare de sa baguette. Deux morceaux de papier prennent place entre la famille. Ce sont des lettres dorées qui y prennent place, échos des mots du fils. Une règle pour Felipe. Une règle pour Isabel.
Elle n’a jamais promis d’autre, Isabel.
Le retour comme seule promesse.
La Muerte - 1960
Londres se dessine différente. Étrange cité pour celle dont la vie n’a jamais été que la campagne. Étrange monde pour celle dont la langue est inconnue. Elle apprend vite, Isabel. Elle apprend vite parce qu’elle se bat pour la survie d’un autre. Elle apprend vite parce qu’elle se bat pour le futur d’un autre. Encore récent, le tatouage sombre qui habite sa main droite la fait sourire.
Regla nueve. Prête à honorer la promesse, elle travaille sans relâche. C’est elle qui verse l’alcool, c’est elle qui le fait couler avec précision jusque dans les verres d’autrui. Le Chaudron Baveur lui a offert une place dans son enceinte, place qu’elle a acceptée immédiatement. À peine assez d’argent pour survivre, elle en garde la plupart pour Felipe. Pour son voyage. Pour son arrivée. Il entrera bientôt à Castelobruxo, le fils. Prêt à suivre les traces de sa mère, loin des conflits, loin de la guerre. Alors qu’elle se déplace au sein des allées sombres, c’est toujours vers lui que son esprit se perd. Peut-être l’esprit se perd-il trop. Peut-être se doit-il de se concentrer sur le présent. Mais l’esprit vagabonde, se noie dans un espoir lointain. L’esprit vagabonde, alors le corps tombe. L’esprit vagabonde, alors le monde disparait.
« DESPIERTA ! » Elle respire. Mais elle ne respire pas. Ses poumons hurlent. Ses poumons toussent. Le corps saigne. Le sol est froid. Douleur. Le monde vacille. Rires. Incompréhension.
« Bonjour ma belle. » Voix lointaine. Voix proche. Qui sait ? Elle ne sait pas. Rires. Encore. Elle ne comprend toujours pas. Respire. Elle le sait. Respirer. Elle y parvient à peine.
« On fait moins sa maline, hein ? » Espagnol. Colombie. L’espagnol au sein de l’anglais. Pourquoi. Magie. La magie relève le visage. La magie tire sur les cheveux.
« Tu nous connais surement pas. » Vision floue. Elle ne voit pas.
« Mais on te connait, nous. » Rires. Toujours. Fuite. Elle doit fuir. Le corps ne bouge pas. Le corps ne peut pas bouger. L’oiseau ne vient pas. Le geai est trop faible. La magie est trop faible. Sa magie. Leur magie ne l’est pas. Leur magie s’empare du corps. Le corps flotte. La voix hurle. Douleur.
« Tu pensais pouvoir échapper à la violencia ? » Les bras perpendiculaires au torse. Le sang qui coule. Le sang qui goutte.
« Dieu ne voudra jamais de toi, asesino. » Meurtrière. Larmes. Non. La promesse.
« La promesa… » Murmure. Rires. À jamais.
Elle se meurt, Isabel.
Elle se meurt comme elle a si souvent tué.
la renovación - april 1995
Respire.
Elle respire, Isabel.
Elle revit, Isabel.
Les paupières s’ouvrent. Elle est seule. Un rayon solaire vient caresser son visage. Elle ne comprend pas. Le chant d’un oiseau se fait entendre. Geai. Son geai. Un geai inconnu. Le corps est douloureux. Une douleur délicate. Une douleur si différente de celle qu’elle a ressentie quelques instants plus tôt. Ses doigts parcourent sa peau. Les blessures sont introuvables. Le sang n’est plus. Elle ne comprend pas. Lentement, elle se redresse. Debout, elle vacille un moment. Le monde se calme enfin. Enfin, elle fait quelques pas vers la porte. Une fois dehors, c’est la lumière qui l’attaque désormais. L’astre se pose fier au sein d’un ciel clair. Aussi loin qu’elle puisse le voir, la vaste campagne murmure. Elle ne peut rester là. Ils pourraient revenir. Elle attend. Elle attend, mais rien ne se passe. Elle attend, mais son corps reste le même. Elle attend, mais le geai ne vient pas. Fatiguée, surement. Elle attend. Elle attend, mais rien ne se passe. Elle attend, mais son monde ne change pas. Elle attend, mais elle ne transplane pas. Fatiguée, surement. Alors elle s’avance, Isabel. Un pas à la fois. Aveugle à la lumière. Aveugle au monde dans lequel elle est revenue. Elle ne sait pas. Elle ne sait rien. Peut-être ne veut-elle rien savoir.
Elle apprend. Les jours passent. Les semaines passent. Elle apprend. Revenante. Sans magie. Trente-cinq ans. Une part de son esprit se prend à penser au fils. Une part de son esprit se prend à penser à la tristesse. Et puis l’esprit l’ignore. Il l’ignore parce qu’il ne veut pas être triste, parce qu’il ne veut pas y penser. À quoi bon penser à ce passé lointain ? Elle se découvre joyeuse, Isabel. Joyeuse parce que la mort se fiche du monde. Joyeuse parce que la mort se fiche d’autrui. Joyeuse parce que la mort ne pense qu’a soit. Joyeuse parce qu’elle s’interdit le reste. Joyeuse parce que la colère et la rage s’y prêtent. Joyeuse parce qu’il s’agit d’un masque qui plait.
Une bouteille s’écrase au sol. Elle l’ignore.
« Pas d’expérience ? Comment vous expliquez que j’ai déjà bossé ici ? » Le Chaudron Baveur se doit de lui offrir un nouveau travail. Elle se doit de gagner sa vie.
« Mamá ? » « Écoutez madame, sans preuve que… » Les mots du manager se perdent. Elle n’écoute plus. Elle n’écoute pas. Lentement, elle se retourne.
« Mamá, eres tu ? » Le cœur de la morte bat une fois. Le masque se brise, éclats de verres qui lacèrent sa peau. Les mots se perdent. Il est l’image du père. Trente-cinq ans. Trente-cinq années. Trente-cinq longues années. Sa vision se floute. Les larmes coulent. Il sourit. Il fait un pas vers elle. Elle fait un pas en arrière. Non. Non. Ou est sa joie ? Pourquoi a-t-elle disparue ? Joyeuse parce qu’elle s’interdit le reste. Elle fait volte-face. Fuir. Il la suit.
« Mamá ! » Elle court. Il court. Elle est rapide, la morte. Elle est rapide parce que son corps est tout ce qui lui reste. Elle est rapide parce que sa magie ne peut l’être. Mais il n’est que magie, l’enfant. Mais il n’est que magie, le fils. Le craquement résonne au sein des allées. Elle se heurte à lui. Elle se heurte à son torse. Des lors que son odeur enivre son âme, elle s’effondre. Les sanglots de l’enfant font écho aux sanglots de la mère.
Le fils pleure parce qu’il a retrouvé Isabel. Il pleure parce que ses rêves sont devenus réalité. Il pleure parce qu’enfin, sa vie vaut le coup d’être vécue.
La mère pleure parce que son masque s’est brisé. La mère pleure parce que Felipe n’est que l’image de son échec. La mère pleure parce que la mort n’est plus.
las lágrimas - november 1995
« J’ai vraiment l’impression que t’essaies pas. » Elle lève les yeux au ciel, Isabel. Fatigue. Voilà tout ce qu’elle ressent. La fatigue de la morte qui ne dort pas. Quelque part dans le fond de son cœur, elle sait qu’il fait tout pour elle. Elle le sait parce que, à de rares occasions, elle sent son cœur battre. Une fois. Deux. Deux battements pour l’enfant. Deux battements pour le fils. Deux battements pour la vie. Mais les battements amènent les larmes. Et elle ne veut plus pleurer, Isabel. Jamais. Alors elle continue. Elle continue de rire de ce rire faux. Elle continue de sourire de ce sourire dessiné. Elle dessine sa joie parce que c’est cela que le monde veut voir. Elle dessine sa joie parce que c’est ainsi qu’elle vit le mieux.
« J’ai vraiment l’impression que je ne suis pas là pour apprendre à manier ma magie. » Plus vieux qu’elle, peut-être, mais il y a cette même lueur d’admiration dans les yeux du fils. Une admiration qu’elle ne comprend pas. Une admiration qu’elle ne supporte pas. Il connait la violencia. Elle l’a abandonnée toutes ces années durant. Et pourtant. Pourtant il continue de l’admirer.
« C’est mal pour un gamin de vouloir connaitre sa mère ? » Elle évite son regard. Il soupire.
« Il faut que j’y aille. » « Mamá ? » Elle frissonne.
« Isabel. » « Isabel, » répète le fils, le regard triste. Elle refuse de l’observer.
« Règle numéro quarante-cinq. » Le cœur bat. Trois fois. La vision se floute. Les larmes coulent.
« Une heure pour la famille, jour après jour. » Silence.
« Ce n’est pas à ça qu’une règle ressemble. » Il rit légèrement.
« Après quarante-cinq ans, j’suis à cours de tournures poétique. » Du coin de son regard, elle l’observe. Les morceaux de papier flottent. Les lettres dorées y prennent place.
« Une règle pour Felipe. Une règle pour Isabel. » Le parchemin vole jusqu’à elle. Elle l’ignore. Elle s’éloigne.
« Il est l’heure, ma chère. » Le serpent pose sa main dans le bas de son dos. Vêtue d’une robe délicate, la joie au visage, la morte semble revivre. On se dit sang souillé, jamais sang de bourbe. Mais même souillé, cela importe peu. Cela importe peur parce que la beauté règne, parce que la joie rayonne. Elle est belle, Isabel. Alors elle se fait belle aux bras d’autrui. L’influence cherche la perfection, l’influence paie pour cela. La morte se dit supporter le régime. L’oiseau se dit supporter le serpent. Oreille attentive au sein d’un monde qui n’est pas le sien, son accent étranger en poussent a trop parler. On la pense délicate parce qu’elle se prétend délicate. Mais le geai est devenu phoenix. Et le phoenix se prépare. Elle sait fuir, Isabel. Elle sait fuir parce que ne pas en être capable a causé sa perte. Sa fuite est précise, travaillée. La fuite des soirées de la haute est aisée. Une caresse, un murmure à l’oreille du cavalier. La fuite du cavalier se complique. Heureusement, l’agence prend soin de ses employées. Un portoloin au sein d’un bijou. Un portoloin pour disparaitre. Mais la fuite n’a jamais été nécessaire. Les sorciers paient pour Isabel. Les sorciers prennent soin d’Isabel.
« Promets-moi de me retrouver, » susurre le cavalier.
« Si la paie est bonne, » rit la morte.
La maisonnée est silencieuse. De retour à la campagne, la richesse de ses clients ont fait de la maison son paradis. Elle quitte sa robe, la laissant recouvrir le sol comme le reste de ses possessions. La magie ne peut empêcher le bazar. Le bazar devient la magie. Un morceau de parchemin attire son attention. Là, sur la table de la salle à manger. Là, sur lequel sont apposées des lettres dorées.
Regla número cuarenta y cinco : Una hora para la familia, día tras día. Le cœur bat. Les larmes coulent. La mère s’écroule.