daily prophet

La Coupe de Quidditch britanique touche à sa fin. Les Hollyhead Harpies sortent vainqueurs du tournoi et la fête bat son plein. La rebellion, elle, murmure (+).
Les tensions montent alors qu'un nouveau revenant est enfermé à Azkaban pour le meurtre "accidentel" de sa fiancée.
Teatime with the Queen : Buckinghamshire est voté le county préféré des sorciers immigrants.



 

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 You're the worst.

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Sujet: Re: You're the worst.   Sam 17 Mar - 0:42


Il tressaille de surprise au contact qui pourtant menaçait. Son regard retombe sur Phaedre, la dévisage comme si elle avait pris des libertés avec leurs petits arrangements habituels : la guerre, pour l’essentiel. Roderick ne se dérobe pas. Sa mâchoire, même, prononce la collusion quand c’est à son tour d’être frôlée. Il sait qu’elle va l’embrasser car les hommes de sa trempe, trop longtemps exercés à la conquête des femmes, sentent ces choses avec intuition. Le baiser est prudent autant que fugace. Ils n’avaient plus été si proches et si intimes depuis des années. La paume a retrouvé le chemin de la taille, elle attire la sorcière encore plus près, juste pour quelques secondes. Très paradoxalement, Roderick n’a jamais tant de naïveté et de bonnes manières qu’avec Phaedre, si bien qu’il n’essaie pas de la retenir ou de lui rendre son baiser avec les intérêts. Ce n’est pas que le feu manque, loin de là ; des souvenirs qui l’assaillent au désir qui le grignote, Roderick rouvre les yeux comme pour bien se souvenir de qui est cette femme, tendue vers lui, quels contentieux demeurent ouverts entre eux et quelle horreur elle lui fait aux entrailles. Après l’audace de cette bouche, il n’est déjà plus très sûr de tout cela. Il n’a qu’à la certitude d’aimer à recommencer. Ils le faisaient trop bien, autrefois, qu’importe le sang qu’il en a fallu reverser.

Quand elle s’éloigne et qu’une gêne modique s’étale sur sa figure, Phaedre est jolie comme au soir où tout a commencé. Qu’elle se justifie ajoute au tableau et un léger sourire entame la commissure de l’héritier. Plutôt que de l’encourager à débusquer les rouages d’une emprise qu’il entend conserver, Roderick reprend l’écrin et, logé dans le creux de sa paume, le lui présente encore : « Alors tu vas dire oui ? » Il n’en démord pas, car, ainsi qu’il l’a dit, la manière lui importe. Il ne mentira pas : il n’a pas toujours voulu d’elle et, d’ailleurs, il n’a aucune inclination particulière pour le mariage mais, tous les comptes faits, au moins ont-ils eu quelque chose ensemble, à la différence de bien de ses anciennes amantes. Son deuil commencé lui a encore donné à penser qu’ils seraient toujours liés, bien au-delà des manigances patriarcales. C’est plus de lien, de lien véritable, que Roderick n’en connaît avec une femme – qui ne soit ni sa sœur ni sa tante, ni Ruby Weasley. « C’est la seule chose qu’on pourra faire à ma manière, donc… J’insiste. Même si je sais que tu seras forcée de m’épouser, je veux t’entendre le vouloir juste une fois, dit-il plus doucement, craintivement. Si tu le veux. » Il s'en remet à la sentence qu'elle prononcera, bien que son obstination érode peu à peu la résistance de sa fiancée, il le voit. Phaedre doit comprendre qu'elle ne gagne rien à aller contre lui et Roderick ne se relâche totalement qu'à la voir accepter.

« Il y a autre chose. » L’Histoire aurait tendances à chuinter comme toujours. Tandis que Phaedre se détachait, Roderick en a fait autant. Il ne sait pas ce qu’il commettrait s’il se tenait près d’elle plus longuement... Dans la proximité des corps, il y a toujours une chose insoutenable, mal-apprise, dont il joue trop bien avec toutes les autres et qu’il redoute lorsqu’il s’agit de l’héritière à la Rose. Son inconfort est maintenu sous bride, un peu parce qu’il refuse de s’écarter non plus. « Pour ce soir, je suis encore clandestin à Londres. Pas rentré au pays, disons. Pas officiellement. Et je me suis dit que, peut-être... »  
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Sujet: Re: You're the worst.   Dim 18 Mar - 20:53


Trois semaines plus tôt, Phaedre aurait juré sa perte. L’orgueil blessé, l’honneur brisé, elle n’était rien de moins que cette héritière coincée dans une sombre alliance, victime des machinations des hommes. Roderick était lui-même: insultant et médiocre. Rien de comparable à l’être presque charmant qui campe face à elle. Dire qu’elle est perdue est un doux euphémisme. Elle ne détourne plus le regard, et dans ces yeux féroces dans lesquels elle se perd, la haine a été supplantée par quelque chose de nouveau. Quoi, elle ne saurait le dire, mais elle n’a plus peur d’y ancrer ses prunelles. Si elle baisse ses armes, un peu, elle n’en oublie pourtant pas qui se trouve face à elle. Un maître de la duperie, aux remords illusoires et à l’humeur changeante. Un baiser de sa part n’équivaut pas à son pardon. Phaedre marque un pas en arrière, pour casser toute tentative d’approche qu’il pourrait tenter en réponse.

Mais plutôt que de répondre par la pareille, il persiste dans sa dernière obsession. Sa main. A la commissure des lèvres de la sorcière se dessine un sourire sans dents. Timide ou lassé, on ne saurait dire. « Je ne comprends toujours pas pourquoi ça t’importe tant. Elle ne voit dans cette question qu’une façon pour lui de rester maître de ses actes. Pas d’amour qui tienne, simplement une énième façon pour Roderick Mulciber de contrôler une situation qui lui échappe. Phaedre pourrait s’en formaliser. Mais qu’aurait-elle à y gagner ? Le sort de son union programmée avec le fils de Kenneth ne sera pas bouleversé par sa réponse. Personne n’a que faire, en vérité, du consentement de Phaedre Rosier. Et je ne sais pas si ce brusque intérêt pour ma main marque un début de paix, ou une simple pause dans tes attaques… Mais soit. » Elle se tait un moment. Un long moment qu’elle laisse durer, pas tant pour le plaisir que parce que, malgré le calme apparent, son esprit bouillonne de contradictions. Quand elle reprend, elle mesure chaque mot, solennelle. « J’accepte de t’épouser. » Pas un geste, toutefois, en sa direction. Elle supplie d’une voix muette pour qu’il ne rende pas les choses plus formelles en mettant de nouveau un genou à terre. Il a gain de cause, pour ne pas changer.

Mais ça ne semble pas suffire. « Il y a autre chose. » Il y a toujours autre chose, manque-t-elle de rétorquer, amère. A la longue liste des exigences du Mulciber, qui s’étale depuis son premier cri jusqu’à son dernier souffle, il ajoute une nouvelle requête. Pas des moindre, l’invitant à le suivre dans son mensonge. Cette fois, l’hésitation est plus palpable. Les esclandres du fiancé amusent la presse, et si l’on se prête parfois à penser le contraire, ça ne va jamais plus loin. Cette fois, c’est différent. Il a creusé, en disparaissant, un fossé avec son clan. Son père n’a pas goûté cette rébellion mal avisée, allant jusqu’à questionner Phaedre sur les déplacements de l’insolent. Roderick s’engage sur une pente qu’il sait savonneuse, son retour ne sera pas sans conséquences. « Tu t’es dit que peut-être, les larbins de ton père ne viendraient pas te chercher chez celle que tu as voulu fuir... » Etrangement philosophe, Phaedre dresse le portrait d’une situation pathétique. Elle n’est pas aveugle sur la conduite qu’a probablement adopté Roderick au cours des semaines écoulées. L’article de Sorcière Hebdo l’a, s’il le fallait vraiment, amené à penser que son mariage à venir n’était aucunement un frein aux mœurs du sorcier. Leur animosité réciproque a fait les gros titres de la presse plus d’un mois durant. Pour ceux qui ignorent les liens complexes entre l’héritière de la maison Rosier et son ancien amant - soit tout le monde excepté eux - la présence de Roderick a ses côtés ce soir a tout d’une hérésie. « Ta simple présence me rend déjà complice. Mais que fais-tu de tous ceux que tu as croisé en venant jusqu’ici ? » Les passants, les clients, les videurs et les putains. Autant d’êtres que rien ne lie au fils Mulciber. Autant d’idiots utiles qui ne demandent qu’à plaire au père. « Ta clandestinité pourrait tourner court. Mais très bien. Admettons qu’il n’en sache rien. Est-ce vraiment entre les quatre murs de ce bureau que tu comptes passer ta dernière soirée d’errance ? » La question l’amuse, un sourire au bord des lèvres, les bras croisés contre sa poitrine. L’esprit rebelle de son ancien compagnon l’a plus d’une fois porté jusqu’en ces lieux. Débauché notoire, il ne courrait qu’après les cuisses de celles qui peuplent les étages du dessous. Amusant que ce soir, ce même cabaret soit devenu sa terre d’asile.
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Sujet: Re: You're the worst.   Mer 21 Mar - 23:55


À la claire lecture que Phaedre a de lui, Roderick opine du menton. Le fait est que ce n’est pas elle – ou pas qu’elle – qu’il fuyait. Néanmoins, le sorcier se garde bien de la reprendre car, pour l’essentiel, l’hypothèse est très juste : pour quelles raisons, alors qu’il a déserté les sphères publiques et même quitté le pays (le continent), viendrait-on le chercher ici ? D’abord, on n’a aucune raison de le croire rentré en Angleterre. Ensuite, les fréquentations alentours du cabaret des Rosier ne sont pas nécessairement, et pas exactement, amies des Mulciber. Bien sûr, il s’en trouvera un, plus loyal ou plus soumis que les autres, pour aller en conter la rumeur mais ce ne sera pas avant le lendemain. Or, une nuit, c’est tout ce que Roderick exige. Sous peu, il ira affronter le courroux paternel. Simplement, pas ce soir. « Dans le pire des cas, ils me trouveront… » À ce moment-là, l’héritier ne ferait aucune histoire et rejoindrait le giron familial. À vrai dire, il doute très sincèrement que Kenneth, fut-il instruit dans la minute de sa présence à Londres, envoie quiconque approcher du bastion des Rosier. À raison de la petite escapade de son fils, les relations entre les deux familles se sont quelque peu tendues. De cela aussi, Roderick n’en prendra toute la mesure que demain. Pour l’instant, il s’accroche au sourire qui écorche, enfin, la bouche de Phaedre. « Ça t’étonne ? il réplique en se fendant à son tour d’un rictus. J’ai passé un millier de mes nuits d’errance, comme tu dis, ici. Enfin… Pas à cet étage. » Il est vrai que l’infatigable Roderick Mulciber aime mieux la société des danseuses et des putains que de la fine fleur de l’aristocratie. Si bien-né soit-il, il ne juge ni ne méprise. En fait, il se complait dans cette sorte de compagnie qui, en retour, ne juge ni ne le méprise. C’est à ce propos que, s’appuyant sur un bord du bureau, il ajoute : « À la longue, je crois que j'ai plus d’amis dans cet endroit qui me cacheraient de mon père que l’inverse… » Sans compter qu’il est vraiment peu de chose que l’argent n’achète pas, surtout dans ce commerce. « Oui, je suis sûr. Avec ta permission. »

Roderick se demande quand ce sera évident – qu'il veut être avec elle.

En s’enfonçant dans le Chemin de Traverse puis en montant les escaliers du cabaret, Roderick avait envisagé qu’elle le fiche à la porte, pétri d’injures et de menaces pour rétribution de ses actes passées. Dans cette conjoncture pessimiste (ou réaliste, c’est selon), il s’en tire à bon compte, comme c’est un peu trop souvent le cas pour qu’il n’ait pas le goût d’en abuser. Loin d’en tirer de la victoire ou de l’orgueil, il ne veut pas non plus partir. Auprès de Phaedre est le dernier endroit où on penserait à le chercher et plus encore à le prouver ; il aurait meilleur accueil, pourrait-on croire, auprès de sa sœur, d’un de ses amis (qui ne soit pas un mangemort et, par conséquent, plus loyal à Mulciber père qu’à lui) ou même de Ruby. Mais ce n’est plus dans ses plans, même les pires. « Tu ne m’as toujours pas insulté, il remarque avec une pointe de légèreté, et je t’ai promis que tu aurais l’occasion de le faire. » Une chose dans la manière dont il dresse le crâne et le torse paraît s’offrir à un châtiment supérieur, une comédie certes grotesque mais qui l’amuse assez pour le distraire un peu. « D'autant que j'imagine à peine combien tu m'en veux pour ces trois semaines. Et pour le reste.  » De diaphanes excuses ourlent petit à petit la carne de la bouche. Elles grignotent, peinent à se frayer un passage. Il ne saurait dire de quoi il est plus le désolé : de l'absence elle-même, du silence, des orgies d'alcool, de violence et de femmes ? Piteuse idée que de mettre en toutes lettres cette sorte de remords ; Phaedre a sans doute plus d'imagination que la réalité ne comportait en fait d'horreurs. Ces crimes de moeurs doivent déborder de ses pupilles car Mulciber les détourne.
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Sujet: Re: You're the worst.   Dim 25 Mar - 22:21


L’échange est singulier. Aucun des deux ne hausse le ton. Phaedre sourit et voilà qu’il en fait autant. L’entente est presque cordiale, et s’il n’avait pas tant blessé l’héritière, elle s’en trouverait presque charmée de cette rencontre qui en rappelle d’autres. Roderick n’est pas que l’homme abjecte de ces dernières semaines, et l’aînée des Rosier semblait l’avoir oublié. Son sourire s’efface un peu, toutefois, à l’évocation de ses soirées ici. Même lorsque rien ne s’y prête, il ne perd pas une occasion de lui rappeler ses frasques. Maladresse, plus que volonté de lui nuire, que la sorcière ne relève pas. Pourtant, le constat suivant sonne comme une évidence, et Phaedre de se rendre à l’évidence : aucun des deux n’est véritablement à sa place, où qu’il soit. « Ces gens sont pour moi de parfaits inconnus. Elle l’imite et s’installe à son tour, jambes croisées sur le sofa adossé au mur. Mais j’imagine sans peine que vos soirées orgiaques vous ont permis de tisser des liens. » Si le sourire demeure, la langue claque un peu plus fort sur les syllabes. Acerbe, peut-être. Jalouse, certainement. Il est chez elle, aussi lamentable que cet endroit soit pour elle. Ces femmes sont les siennes, ces poivreaux lui sont redevables. Et pourtant, à choisir entre les deux anciens amants, tous n’en auraient que pour Roderick. Parce qu’il s’est mis à leur hauteur, parce qu’il est devenu leur égal. Dans sa propre maison, Phaedre est éclipsée.

Un moulinet de la main est la seule réponse qu’elle offre. Sa permission, puisqu’il la demande. Phaedre n’a pas l’envie qu’il parte, mais encore moins le désir de lui faire savoir. L’indifférence est une défense comme une autre, et sa main traduit à elle seule tout ce que l’héritière aurait pu bafouiller en quelques mots. « Tu ne m’as toujours pas insulté. » « Pas à voix haute, non. » Les noms d’oiseaux ont pourtant défilé dans sa tête, à plus d’une occasion depuis qu’il a franchi ces portes. De moins en moins nombreux. Rarement pensés, à mesure qu’ils échangent sur un ton plus civilisé. Et malgré l’invitation, Phaedre n’entend pas donner suite.

Elle allait rétorquer quelque chose, avant qu’il n'enchaîne. En l’écoutant, elle songe aux trois semaines écoulées. Et ne se sent clairement pas les épaules pour en parler. Tour à tour soulagée, abandonnée, craintive et mortifiée, l’aînée des Rosier n’a pas avancé d’un pas. Lui, en revanche, est revenu changé. En quoi, elle ne saurait le dire. Et s’avoue volontiers bien trop hésitante face à la réponse qu’il pourrait lui donner. « Ce ne sont pas quelques insultes qui suffiront à passer l’éponge sur ce qui s’est dit ces derniers mois. » Elle se veut philosophe, mais l’amertume se fraye son chemin. L’héritière détourne la tête, de sorte que le fils Mulciber ne soit plus qu’une forme floue au coin de ses yeux. Elle semble ainsi songeuse, le regard perdu sur les titres qui s’alignent sur l’imposante bibliothèque qui occupe le pan de ce mur. En vérité, elle ne pense qu’à ces cris, ces coups et ces larmes qu’il a provoqué chez elle. Jamais aucun autre n’a su la faire autant sortir de son éternelle posture de fille idéale. « Mais n’en parlons plus. Pas ce soir, en tout cas. » Un bref soupir, et son masque reprend sa place. Son sourire posé sur ses lippes, ses mains croisées sur son genou. Phaedre des grands jours. « Sers nous un verre, et faisons comme si tout allait bien. » Son timbre léger ne fait qu’inviter son ancien amant à éviter les sujets périlleux. La fille Rosier s’en sait incapable, et craint encore que ce nouveau Roderick soit une vision éphémère. Le lancer sur un échange aussi fragile aurait tôt fait de réveiller ses vieux démons. Et cela, Phaedre ne le permet pas. Elle poursuit, un peu faussement. « Pourquoi ne pas me raconter ce qui peut l’être, de ces dernières semaines ? » En oubliant les putains, les bordels et la débauche, en faisant comme si l’honneur de sa fiancée n’avait pas été fracassé entre les cuisses de la première venue.
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Sujet: Re: You're the worst.   Lun 26 Mar - 18:16

Rien ne passera l’éponge sur ce qui s’est dit ces derniers mois, sur aucun des versants. Bien qu’il soit venu avec des intentions fort honorables pour un gredin de son espèce, Roderick n’espère pas le pardon tant il est lui-même incapable d’absoudre l’héritière pour les vérités proférées. Ils vont s’en vouloir longtemps, peut-être se haïr toujours, ou se rattraper un peu. Car il y a quelque chose, il y a définitivement quelque chose entre eux. Il s’étonne que ce ne soit pas brisé, émietté et dispersé aux quatre vents. L’idée que le chagrin les réunisse l’exaspère mais ses sentiments à ce sujet sont encore si confus que Mulciber ne sait pas la combattre. Quoi que ce soit, il est forcé d’admirer la prouesse des sourires qui creusent mieux dans la bouche et de l’atmosphère qui s’égaye quelque peu. En filigrane, une éternelle tension subsiste, une sorte d’avertissement : il faudrait une méprise, le mot de trop, un relâchement minime et tous les ressentiments en latence leur sauteraient à la figure. Plus prudent que jamais, il n’en essaie pas moins de se détendre ou, à tout le moins, de paraître détendu.

Si Roderick saisit le trouble qui s’empare brièvement de Phaedre, il feint de n’en rien voir. Très bien, ils n’en parleront pas. Pas ce soir. C’est, tout compte fait, plus commode de la sorte ; il n’a aucune gloire à répandre, nul épisode dont il puisse s’enorgueillir et, surtout, elle est la dernière destinataire de ce récit. Il n’en conterait pas un chapitre à moins d’y être contraint et ne le sera jamais assez. Alors Mulciber se redresse et obéit ainsi qu’elle le commande, sert deux verres, lui en tend un, fait le tri de l’indicible sans avoir l’air d’y réfléchir.

« Je t'ai acheté une bague de fiançailles, pour commencer. » Roderick sourit avec son peu d'insolence. Celle-ci maquille fort mal son malaise, mais tant pis.

Il ne peut pas parler de ses jours infâmes, de ses nuits perverses. Pas à Phaedre. Il ne peut pas parler du Kosovo et de Ruby. Le même tabou frappe à peu près chaque seconde de chaque minute qu'il a passé à se détruire le crâne, le sang, la plus petite fibre de ses muscles. S'il imaginait que la douleur s'en irait et qu'elle pillerait, avec, sa putain la colère, les deux n'ont fait que s'exacerber à mesure qu'il perdait le contrôle. Il ne se souvient pas de tous les moments. Il a connu plus de soird que de matins. Quand il y repense, il a encore mal et même un peu honte. Ce n'est pas seulement que Phaedre ne veut pas entendre, c'est aussi que Roderick ne tient pas à ce qu'elle sache. Son opinion est suffisamment déplorable comme cela. Alors les dents grincent gentiment, car ce qu'il reste d'audible tiendrait sur l'un de ces timbres moldus.

"J'ai vu quelques capitales, dit-il d'une voix laconique en lorgnant le liquide dans son verre. Et certaines des guerres du continent... J'ai été seul la plupart du temps." Au moins, cela est vrai. Et ç'a été reposant. Roderick ne se pensait capable de profiter d'une solitude. "Je suis allé en France, lui jette-t-il un coup d'oeil comme s'il s'agissait d'une sorte d'hommage très personnel. Et je les déteste... Avec leur accent prétentieux, leur tour Eiffel laide à mourir... Tu ne m'y feras jamais retourner." Après une gorgée éthylique, Roderick le dit comme s'ils avaient des projets ensemble. Un mariage en est un, en quelques sortes. Pas tant le leur, néanmoins. "Et toi ? Qu'as-tu fait en trois semaines ?"
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Sujet: Re: You're the worst.   Ven 6 Avr - 1:35


En le voyant franchir la porte de son bureau, la jeune héritière ne misait pas grand chose sur cette entrevue. Tout juste parvenait-elle à penser sans trembler à leur dernière rencontre. Il avait tempêté, hurlé, martyrisé, laissé peu de doutes sur la nature de leur relation. La haine dans ce qu’elle a de plus viscérale. Trois semaines écoulées, et le poison, pourtant, semble s’être dissipé. La surprise est totale, l’incompréhension toujours plus forte, à mesure qu’elle prend la notion de ces mots qu’ils s’échangent. Calmes, paisibles. Comme si la guerre n’était plus une option. L’enfant s’est effacé, et l’adulte s’est enfin raisonné. Pour longtemps ? Les craintes subsistent, et se dissipent à mesure que Roderick se dévoile. Phaedre est une idiote ou une optimiste. Mais ce souffle nouveau lui est indispensable.

Il cherche ses mots. Combien qui voudraient franchir ses lippes, et qu’il retient d’un rien ? Tant de choses inaudibles, qu’il préfère lui taire. Elle s’en voit soulagée. Il y a peu, il aurait sauté sur l’occasion pour lui narrer ses exploits pathétiques, pour s’assurer que la honte s’abatte sur l’héritière. A présent, il analyse, il décortique. Et il se tait. Tant de mystères qu’elle devine sans mal, ou du moins le pense t-elle. La vérité la surprendrait sûrement plus que ces images de luxure qu’elle s’imagine en silence. Pour les chasser, elle trempe ses lèvres dans le verre tendu par Roderick et l’écoute verser dans la banalité. Sa bague n’est qu’un prétexte pour rompre le silence devenu trop gênant. Celui-ci revient aussitôt, tandis que le fils Mulciber s’en retourne à sa recherche d’une anecdote à raconter. Le tri est fait, enfin. Il parle pour ne rien dire, conte ce qui peut l’être: des bribes insignifiantes. Phaedre écoute, sourit, laisse le contenu de son verre tourner entre ses doigts. Avant de rire plus franchement en l’entendant mentionner son pays d’origine. La France, dans son récit, est toujours le pays honni. Il ne l’avait pas à son bras depuis cinq minutes qu’il s’était déjà empressé de glisser quelques critiques sur le pays des Lumières.

Cela semble loin, désormais. Comme un vague souvenir qui se manifeste après avoir trop longtemps sombré dans l’oubli. Le sourire s’élargit, plus à l’évocation de ce passé commun qu’à la plaisanterie de son ancien amant. « Si mon père t’entendait… La lèvre inférieure pincée, Phaedre secoue la tête d’un air désolé. Elle n’a de française que le nom et le port altier. Et cet orgueil propre à ceux-là, hérité en ligne directe de son paternel. Lui dont l’accent anglais se teinte parfois de ses modulations d’origine ne s’indignerait pas tant de l’insolence de Roderick que de la passivité de Phaedre devant son discours. Tu n’oublies pas, j’espère, à quelle famille tu t’apprêtes à t’unir ? » Tout à fait droite sur le bord de l’assise du canapé, elle plante ses iris dans celles du Mulciber. « Et c’est assez audacieux de la part d’un Mulciber de reprocher à d’autres leur prétention... » Sans se départir d'un léger sourire, Phaedre rend à Roderick la monnaie de sa pièce. Il ira en France, c’est la condition sine qua non lorsqu’on épouse une Rosier. Il y a des cousins à visiter, des égos à flatter, des amitiés à entretenir. Le sang des Rosier d’ici se noie à celui des sorciers de Grande-Bretagne, mais les alliances persistent outre-manche. Avec le climat d’ici qui s’assombrit pour les gens de leur espèce, il est plus que jamais nécessaire de se prévoir une porte de sortie. Mais l’heure n’est pas aux débats, et il y a eu bien assez de compromis pour un soir. Alors, Phaedre n’en dit pas davantage, et le laisse poursuivre le récit de ses aventures. Une question, finalement.

Et un silence qui en dit long sur la teneur de ses propres jours. Phaedre n’a rien à en dire. Rien ne s’est passé, parce que nul ne l’a laissé en paix. Roderick est parti en plein tourment médiatique. Laissant Phaedre aux prises avec la presse à scandales, les rumeurs et les articles ronflants. Quand le calme s’installa de nouveau, on commença à s’inquiéter du silence de Roderick. S’en suivi alors les heures sombres où, seule sur une chaise inconfortable face au seul Kenneth Mulciber, Phaedre essuya plus de questions qu’elle n’avait de réponse. Tandis que le duelliste tirait parti de la plus totale liberté, Phaedre voyait la sienne s’évaporer. Quand il fut évident qu’elle ne serait d’aucun secours, on la laissa tranquille. Et c’est là tout le bienfait qu’elle tira de ces trois semaines : une solitude réparatrice. Le film de ses jours déroule devant ses yeux, et il n’y a rien qui lui paraisse digne d’être raconté. Une pointe de jalousie pique l’héritière, à l’idée que Roderick a une fois de plus tiré le meilleur de la situation. D’une traite, elle vide son verre et se relève pour poser son verre sur le plateau où repose la bouteille. Elle se dit qu’en marchant, peut-être ne laissera t’elle pas tant filer sa frustration. Une maigre distraction qui, pourtant, fonctionne un peu. « Rien d’inhabituel. Du travail, encore et toujours. Peut-être devrais-je y retourner, d’ailleurs. »

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